C’était LA star incontestable de la journée. Les pavés. Aussi redoutés qu’attendus. Premières difficultés de cette 109ème édition. Et les organisateurs n’y sont pas allés de main morte. 11 secteurs au total attendaient nos coureurs, dont 5 totalement inédits. Soit 19,4 km de risque de chute, de crevaison ou de casse. Du jamais vu sur le Tour de France. Un sacré défi acrobatique qui n’a pas manqué de secouer nos coureurs !
Secouée, l’équipe de Départements de France l’a été elle aussi. La patrouille avant la première. Elle qui part chaque jour en éclaireur, plusieurs heures avant le peloton, lorsque tout le monde est encore dans les bras de morphée ou émerge tout juste d’un sommeil profond. Pour elle, c’était l’étape de tous les records : 171 panneaux de signalisation à poser sur 157 km entre Lille et Arenberg. Des rétrécissements, des îlots directionnels, des giratoires… mais rien sur les secteurs pavés ! Et heureusement, sinon il faudrait signaler un danger tous les 10 mètres ! Pas question de toucher aux pavés non plus pour le Gros Léon, en dehors des entrées et des sorties de secteurs, histoire de les laisser « dans leur jus », comme aime le dire l’équipe. C’est précisément ce que veulent les organisateurs du Tour. Que les coureurs s’y cassent les pattes et y mordent la poussière. Car sur les pavés, tout peut arriver. Le pire, comme le meilleur. Les frissons dans l’échine des coureurs. Les étoiles dans les yeux des spectateurs. Et le premier grand écrémage de ce Tour de France.
Pour faire durer le plaisir, les concepteurs du parcours avaient inscrit au menu pas moins de 11 secteurs pavés, avec des passages totalement inédits, dont certains ont refait peau neuve pour le passage de la Grande Boucle. Mais le plat de résistance n’est arrivé qu’à mi-parcours, après un départ en douceur à Lille et dans sa métropole. Déjà dans la capitale des Flandres, le pavé narguait le chaland. Surplombant, la foule depuis le char du Département du Nord, il défilait dans la caravane publicitaire pour la première fois au milieu des Haribo, Cochonou, FDJ et autres habitués de longue date !
Seuls quelques géants, croisés sur la route, fièrement exposés par les villageois, pouvaient lui faire un peu d’ombre, et encore. Un simple coup d’œil à leur triste mine figée, donnait envie de poursuivre sa route jusqu’aux secteurs pavés.
Sous les pavés, la peur
C’est d’ailleurs là que s’est agglutinée la foule. Là qu’on a retrouvé l’ambiance du Tour, quelque peu perdue depuis le Danemark. Là, que le public, à la fois enivré par la course et par l’alcool, exultait à quelques centimètres des coureurs, au plus près de l’action.
Jusqu’au bout, l’air fut irrespirable. Jusqu’à la victoire de l’Australien Simon Clarke dans un sprint à l’arraché et au photo finish.
Comme l’avaient prédit les experts, ce Lille-Arenberg a eu son lot de dégâts. Le Belge Wout Van Aert était à ça de perdre son maillot jaune, à 13 secondes très précisément, après une chute à 96km de l’arrivée. Son coéquipier de la Jumbo-Visma, Primoz Roglic a lui aussi goûté au bitume du Nord. Le Slovène s’est luxé l’épaule et a dû la remettre en place tout seul. Quant à Tadej Pogacar, dernier vainqueur du Tour, il a éclaboussé le reste du peloton de son talent.
On en aurait presque oublié la volonté des organisateurs de mettre à l’honneur sur cette étape le passé minier du Nord. Difficile pourtant de rater la mine d’Arenberg et son chevalement, trônant sur la ligne d’arrivée. Silencieux depuis sa fermeture définitive il y a 30 ans, le site est aujourd’hui classé au patrimoine mondial de l’humanité, et entretient la mémoire des dizaines de milliers de « gueules noires » qui ont plongé dans la mine pendant 86 ans.
Après ce bref saut dans le temps, on quitte à nouveau la France pour le 3ème pays de cette édition : la Belgique.