Statut de l’élu : le Sénat publie deux rapports

La Délégation aux collectivités territoriales du Sénat a examiné le 14 décembre deux rapports sur le statut de l’élu. Le premier présente des propositions pour améliorer et sécuriser l’exercice du mandat et la conciliation de celui-ci avec la vie personnelle et professionnelle. Le second aborde la sortie du mandat local.

Ces propositions devraient nourrir la réflexion du Gouvernement pour son projet de loi sur le statut de l’élu, prévu pour le premier semestre 2024. Au 105e congrès des maires, le Président du Sénat, Gérard Larcher a également annoncé le dépôt d’une proposition de loi dans les prochaines semaines.

  • Améliorer et sécuriser l’exercice du mandat et la conciliation de celui-ci avec la vie personnelle et professionnelle.

RECOMMANDATION n°1 : faciliter l’utilisation des autorisations d’absence pour les maires avec 3 mesures pratiques.

RECOMMANDATION n°2 : simplifier et sécuriser les règles liées à la mise en œuvre pratique des conflits d’intérêt.

  • Allonger les délais de dépôt des déclarations d’intérêt auprès de la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATPV) de 2 à 5 mois.

Pour les élus locaux, l’essentiel des conflits d’intérêt potentiels découlent des désignations dans divers organismes où ils représentent la collectivité. Par exemple, une région nomme jusqu’à une dizaine d’élus dans environ 1 500 organismes extérieurs, créant des milliers de conflits d’intérêt potentiels au moment de ces nominations.

Allonger les délais permettra aux exécutifs de mieux agencer la combinaison des intérêts préalables à l’élection, les responsabilités exercées au sein de l’exécutif et des impératifs de désignations extérieures, ainsi que la prise de conseils auprès du référent déontologue. Cet allongement permettrait aussi de réduire les déclarations correctives liées à ces mouvements de début de mandat ;

  • Faire pré-remplir par l’administration la déclaration de patrimoine des élus locaux, sur le modèle de la déclaration de revenus pré-remplie par l’administration fiscale pour les contribuables ;
  • Donner une base légale obligatoire à la mention du déport sur les PV des assemblées.

RECOMMANDATION n°3 : s’interroger sur le recentrage de la responsabilité pénale personnelle du maire sur les situations d’infraction intentionnelle.

RECOMMANDATION n°4 : favoriser les dispositifs qui reconnaissent l’engagement des élus.

  • Lancer, avant les municipales de 2026, une campagne nationale de communication de grande ampleur, pour présenter les missions des élus locaux et leur travail au service de l’intérêt général, qui clarifierait la réalité du mandat et serait de nature à susciter des vocations ;
  • Créer un label « employeur partenaire de la démocratie locale » ou « entreprise citoyenne » pour les structures comptant des élus locaux dans leur effectif, à l’instar de ce qui existe pour les sapeurs-pompiers volontaires. Il pourrait être envisagé des avantages fiscaux ou l’octroi d’un crédit d’impôt spécifique de l’État ainsi que la reconnaissance au titre de la responsabilité sociale des entreprises ;
  • Réduire à douze ans la durée requise pour bénéficier de l’honorariat municipal (actuellement 15 à 18 ans selon les niveaux de collectivités) ;
  • Modifier la dénomination sous laquelle apparaissent les heures d’absence d’un élu sur son bulletin de salaire en passant d’« absence non rémunérée » à « absence fonction d’élu local de la République ».

RECOMMANDATION n°5 : faciliter l’exercice du mandat pour tous les élus quelle que soit leur situation avec six mesures concrètes.

  • Permettre la poursuite de l’exercice du mandat pendant le congé maternité/paternité des élus, sauf avis du contraire du praticien en cas de congés maternité et reconnaitre donc la légalité du cumul des indemnités de fonction avec les indemnités journalières versées aux femmes enceintes élues ;
  • Élargir la possibilité de prise en charge des frais de garde d’enfants à l’ensemble des activités de l’élu nécessaires à l’exercice du mandat local. En effet, ces frais de garde sont principalement engagés le soir ou le week-end : réunions publiques, séminaire de l’exécutif, réunions de préparation, etc. ;
  • Étendre la compensation par l’État des frais de garde engagés par les élus pour la participation aux réunions liées au mandat jusqu’aux communes de 10 000 habitants ;
  • Réactiver les négociations bilatérales avec les États voisins de la France afin de conclure des conventions limitant les conséquences négatives de l’absence d’harmonisation entre statuts pour les élus transfrontaliers ;
  • Prendre en compte le fait d’exercer un mandat électif dans les entretiens professionnels à l’instar de ce qui est fait pour les salariés élus du personnel ou délégués syndicaux ;
  • Autoriser, sous certaines conditions à définir, la visioconférence pour les réunions et les commissions au niveau des communes et des intercommunalités

RECOMMANDATION n°6 : faciliter et solenniser l’entrée dans le mandat en accompagnant les élus locaux, notamment les nouveaux.

  • Instaurer une cérémonie officielle de prestation de serment de chaque maire devant le conseil municipal ;
  • Suggérer aux associations d’élus d’adresser un courrier pour informer les élus sur leurs droits ;
  • Créer un droit à l’information des élus locaux en début de mandat qui se traduirait par la mise en place d’une ou deux journées d’information mobilisant les associations d’élus et les services de l’État quelques semaines après le scrutin. Ces journées auraient pour objectif de poser les fondamentaux de la fonction de maire et seraient une porte d’entrée du dispositif de formation en expliquant aux élus comment mobiliser leurs droits à formation encore trop méconnus de ces derniers et particulièrement complexes à mettre en œuvre ;
  • Élaborer un mémento ou un guide du statut des élus locaux qui traduise le droit en langage courant afin de faciliter la compréhension et l’appropriation des dispositifs légaux par les élus. Ce mémento serait remis lors des journées d’informations de début de mandat mentionnées ci-dessus. Il permettrait ainsi de regrouper les points ayant trait aux conditions d’exercice du mandat local pour être diffusé aux employeurs et aux gestionnaires de ces dispositifs (DRH notamment). Il serait réalisé par la direction générale des collectivités locales (DGCL).
  • Mettre en place un système de parrainage, sur la base du volontariat entre les nouveaux maires élus et d’anciens maires du département (hors de la commune concernée), organisé par les associations locales d’élus

RECOMMANDATION n°7 : inciter les élus locaux à faire usage de leurs droits à la formation et fluidifier le système de gestion.

  • Inciter les élus à se former et les collectivités de rattachement de l’élu à s’impliquer plus avant dans la formation de leurs élus en abondant leurs comptes DIFE ;
  • Étendre le Congé de formation économique, sociale, environnementale et syndicale (CFESES) ouvert à tout salarié, aux formations à l’exercice d’un mandat local et pas seulement syndical ;
  • Étendre les possibilités de report des crédits formation non consommés au budget formation de l’exercice suivant en cas de création d’une commune nouvelle ;
  • Simplifier l’accès et le fonctionnement de la plateforme numérique du DIFE ;
  • Relever le niveau de compensation financière dont bénéficient les élus qui perdent du revenu en se formant de 1,5 SMIC à 2 SMIC.

https://www.senat.fr/fileadmin/Office_et_delegations/Collectivites_territoriales/Controle/Essentiel_VD_au_14_12_23.pdf

 

Réussir la sortie du mandat local

RECOMMANDATION 1 : production de données chiffrées (statistiques) afin de suivre les sorties de mandat des élus locaux.

RECOMMANDATION 2 : aménagement des conditions de sortie de mandat afin de faciliter cette transition parfois délicate dans la vie des élus locaux :

  • Diffusion par le préfet d’un guide d’information recensant les droits des élus en fin de mandat. La distribution du guide se fait en début, en milieu et en fin de mandat ;
  • Maintien sur un semestre des coordonnées institutionnelles de l’ancien élu (réception du courrier, adresse mail…)

RECOMMANDATION 3 : adaptation de l’allocation différentielle de fin de mandat à la diversité des situations par :

  • L’information systématique en fin de mandat, par le préfet par exemple, de l’existence et des modalités d’accès à l’allocation différentielle de fin de mandat ;
  • L’extension du champ de l’allocation différentielle de fin de mandat aux maires des communes de moins de 1 000 habitants ;
  • L’ouverture du droit à l’allocation différentielle de fin de mandat pour les élus démissionnaires en cours de mandat.

RECOMMANDATION 4 : perfectionnement du régime de retraite des élus par :

  • L’octroi d’une bonification de trimestres (un trimestre par mandat, par exemple) ;
  • Rendre le régime « Ircantec élu » indépendant des autres régimes, afin de lever les barrières au versement de la retraite professionnelle.

RECOMMANDATION 5 : renforcement de l’accompagnement dans le processus de validation des acquis de l’expérience (VAE) :

  • Développer des synergies entre le monde des élus locaux (associations, notamment) et l’Université ;
  • Conduire une action informative sur la VAE auprès des élus locaux ;
  • À terme, élaborer un référentiel national de formation

RECOMMANDATION 6 : création d’un certificat de compétences professionnelles pour les élus locaux.

RECOMMANDATION 7 : donner la faculté à l’ancien élu de saisir le référent déontologue de son ancienne collectivité d’élection pour être conseillé et mieux se protéger du risque pénal.

RECOMMANDATION 8 : insertion dans le statut des « sociétés à mission », aux côtés des objectifs sociaux et environnementaux, d’un volet « citoyen » visant à favoriser le recrutement et la reconversion professionnelle d’anciens élus.

https://www.senat.fr/fileadmin/Office_et_delegations/Collectivites_territoriales/Controle/Essentiel_V2.pdf

Partager l'article