ZAN : comment accompagner les élus ?

Sur le terrain, les sénateurs sont de plus en plus interpellés par les élus locaux sur le zéro artificialisation nette (ZAN), un enjeu essentiel pour l’avenir des territoires. Derrière cet acronyme, ce sont le logement et le développement économique des territoires ruraux et périurbains qui se jouent. Afin de répondre aux enjeux présents, un débat a été organisé au Sénat le 18 janvier 2024 en présence de Christophe Béchu, ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires.

Préserver la biodiversité et les espaces naturels et agricoles est devenue une nécessité. Selon les sénateurs, une politique efficace de transition écologique et sociale suppose de ne pas opposer cet impératif à la construction de logements. Il faut sortir de certains dogmatismes pour relever les défis qui se présentent. Or, les élus locaux doivent mettre en application les objectifs de la loi Climat et résilience.

Malgré la loi du 20 juillet dernier, qui a prévu des adaptations pour tenir compte des remontées de terrain, le ZAN continue d’effrayer les élus ruraux. Les échéances sont connues : division par deux de la consommation d’espaces naturels, agricoles et forestiers (Enaf) sur la décennie 2021-2031 par rapport à la décennie précédente et atteinte du ZAN à l’horizon 2050.

Des correctifs ont été prévus, comme la valorisation des efforts de renaturation dès la première décennie et de nouvelles échéances pour l’intégration des objectifs dans les documents de planification et d’urbanisme : 22 novembre prochain pour les Sraddet et autres schémas régionaux ; 22 février 2027 pour la compatibilité des Scot aux objectifs régionaux ; 22 février 2028 pour celle des PLU, PLUi et cartes communales à ces objectifs. Sans oublier la garantie rurale d’un hectare : toutes les communes ne l’utiliseront pas forcément, mais elles conserveront la possibilité de construire un équipement nécessaire à la vitalité de leur territoire.

Les sénateurs veulent poursuivre le travail sur ces sujets, en tenant compte des attentes des élus et en ne laissant pas croire qu’il y aurait une France à deux vitesses : une France urbaine bien dotée en ingénierie et une autre qui en serait privée. Les élus demandent des moyens et un accompagnement, pas que l’État agisse à leur place.

Ils ont insisté sur le besoin d’emploi et de logements dans toutes les communes, notamment petites et moyennes. « Nous ne pourrons pas répondre aux besoins uniquement par la réhabilitation du bâti existant : nous aurons besoin de construire encore, mais pas n’importe comment ni n’importe où », a déclaré la sénatrice Cécile Cukierman.

Le ministre Christophe Béchu a tout d’abord rappelé l’unanimité des experts et scientifiques : lutter contre l’étalement urbain entraîne des bienfaits et préserve la biodiversité. Ce n’est pas anecdotique, notamment pour les insectes pollinisateurs, dont le service rendu est incalculable.

Les espaces naturels, agricoles et forestiers stockent du carbone, contrairement aux espaces artificialisés, qui en renvoient et qui participent au réchauffement.

L’adaptation sera donc un enjeu essentiel. « Dans le Pas-de-Calais, les habitants s’interrogeaient sur les autorisations d’étalement urbain. Malheureusement, cette prise de conscience a été payée au prix fort » a-t-il précisé.

Cependant, face à l’ensemble des défis du ZAN, la souveraineté alimentaire reste cruciale. Il a souligné l’impérieuse nécessité de conserver des espaces pour produire, car il y aura moins de ressources face à plus de monde sur la planète.

Selon lui, il ne faut pas arrêter de construire, mais limiter le rythme de progression. « D’ailleurs, la crise du logement n’est pas liée au ZAN, sinon il n’y aurait pas le même problème en Allemagne, en Belgique, en Espagne... ».

La loi du 20 juillet 2023 a amené de nombreuses avancées comme la garantie rurale, la commission de conciliation, les projets d’envergure nationale et européenne… Cependant, il reste encore beaucoup à faire, soulignant son souci de prendre le temps de voir davantage les élus et les parlementaires pour ajuster.

Le Gouvernement a publié un guide de seize pages abondamment illustrées. Ce document reprend des engagements importants comme les zones d’aménagement concerté (ZAC), qui peuvent être rattachées à la période précédente.

Il a rappelé avoir fait des ateliers, notamment à Dieppe, pour s’assurer que les projets nationaux ne remettaient pas en cause la réindustrialisation. En Auvergne-Rhône-Alpes, il a animé une COP régionale avec le président Laurent Wauquiez, devant 400 personnes durant laquelle il a vu que de nombreux élus voyaient l’utilité de conserver les espaces. Le prochain atelier sera dans le Calvados ou la Manche.

Des centaines de projets sont remontés. Une liste a été communiquée aux Présidents de région pour décider des projets d’envergure nationale ou européenne, pour lesquels existe un forfait jusqu’en 2031. Certains projets ne seront pas finis à cette date, comme les EPR : ils compteront pour zéro.

Pour la première catégorie, celle des projets achevés d’ici à 2031, seule sera prise en compte l’emprise de l’ouvrage et non celle du chantier, utilisation temporaire de l’espace. Dans cette catégorie, pourront être retenues des zones occupées par des sous-traitants, à condition que l’on connaisse les porteurs des projets.

Le décret sera soumis au public et à la commission de conciliation afin de modifier la liste. Ces listes seront révisables tous les ans, souplesse voulue par le Sénat.

En 2023, 1 225 hectares de friches ont bénéficié du fonds vert, et 685 hectares ont été renaturés, pour 479 millions d’euros. Deux mille hectares, c’est 20 % de plus que ce que nous prévoyions, sachant que le fonds vert passe de 2 milliards à 2,5 milliards d’euros, avec une massification de l’effort sur les friches.

Sur l’ingénierie, les 250 millions d’euros du PCAET seront finalisés et un pacte entre toutes les agences – Ademe, ANCT, Cerema – sera conclu. Enfin, les aides que l’État octroie vont être publiées.

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