Les sénateurs ont voté le 14 novembre un amendement à l’article 10 du PLFSS augmentant de 250 millions d’euros le montant des concours versés par la CNSA aux Départements. Alors que la Première ministre avait annoncé une première enveloppe de 150 millions, DF se félicite d’un vote à la hauteur des enjeux de l’autonomie et du grand âge. Cet amendement prouve la grande attention du Sénat aux besoins réels des Départements pour faire face aux besoins sociaux.
Lors des 92e Assises de Départements de France, la Première ministre avait annoncé que la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA) dégagerait une première enveloppe de plus de 150 millions d’euros en 2024 pour remonter les compensations de l’allocation personnalisée d’autonomie (APA).
« Il ne se passe pas un jour sans que nous en soyons sollicités par des services d’aide à domicile ou par des EHPAD en difficulté pour payer leurs échéances. Alors que nous demandions 300 millions au Gouvernement, cette annonce nous a paru en deçà des enjeux. C’est un premier pas pour renforcer le financement de l’autonomie par la CNSA certes, mais un premier pas qui en appelle d’autres », explique François SAUVADET, Président de DF.
Pour rappel le taux actuel de couverture moyen par la CNSA est de 40% des sommes engagées, pour un montant total de près de 10 milliards d’euros de dépenses portées par les Départements au titre des politiques de l’autonomie (APA / PCH). Ce niveau d’intervention ne permet en aucun cas de faire face, à terme, aux défis notamment démographiques. Départements de France avait ainsi demandé en mars et en juillet 2023 une révision des concours de la CNSA sur une trajectoire de compensation à 50% des dépenses engagées par les Départements.
- Fusion des sections soins et dépendance pour le financement des établissements d’hébergement pour personnes âgées dépendantes
Sur les plus de 1 300 amendements examinés, les sénateurs ont également adopté celui de la commission des Affaires sociales transformant l’article 37 en expérimentation de la fusion des sections « soins » et « dépendance ». Selon eux, la fusion des sections, telle qu’elle est proposée par le Gouvernement créera des complexités et des disparités entre Départements. C’est pourquoi, ils ont proposé une véritable expérimentation, sur trois ans, à compter de 2025, dans dix départements volontaires, avec une évaluation par la CNSA et un rapport remis au Parlement.
Accéder au rapport : https://www.senat.fr/amendements/2023-2024/77/Amdt_303.html
Ils ont également adopté des amendements fixant au 30 juin 2024 la date limite pour permettre au Département de choisir de participer à l’expérimentation.
Dans le débat engagé, face aux sénateurs qui ont exprimé la crainte d’une recentralisation rampante, la ministre déléguée chargée des personnes handicapées, Fadila Khattabi, a souhaité les rassurer en déclarant que les Départements restent chefs de file des politiques de l’autonomie, donc des EHPAD, mais aussi du virage domiciliaire.
L’amendement de DF pour une expérimentation miroir, visant à fusionner les sections soins et hébergement, a été discuté, mais non adopté. Les sénateurs ont constaté que cet amendement proposait uniquement une fusion de la tarification des deux sections.
S’agissant du report de la date butoir : si le Gouvernement souhaite laisser aux Départements le temps nécessaire pour prendre leur décision, ce report doit rester compatible avec la préparation des transferts financiers en janvier. Un report au 30 juin serait trop tardif. Le Gouvernement proposera de décaler la date d’au moins un mois.
- Reconnaissance de la MTPH de Saint-Martin
Les sénateurs ont adopté les amendements déposés pour une reconnaissance de la Maison territoriale des personnes handicapées (MTPH) de Saint-Martin. Ces amendements visent à adapter à Saint-Martin la composition du conseil départemental de la citoyenneté et de l’autonomie et à créer officiellement la MTPH.
En effet, à la suite de la création en 2007 de la collectivité d’outre-mer à compétence départementale de Saint-Martin, la MTPH n’a pas été créée ; aucune dotation n’a été versée ni aucun agent mis à disposition. C’est un service de la collectivité qui assure les missions d’une MTPH.
Les dispositions votées donnent donc une base légale à ce mode de fonctionnement, sécurise les relations avec la CNSA et rend la collectivité éligible aux financements en vue de créer une MTPH.
- Soutien complémentaire de la CNSA aux Départements de 150 millions d’euros
Les sénateurs ont validé l’amendement du Gouvernement concrétisant un engagement pris par la Première ministre et Aurore Berger lors des Assises des départements de France. Sans attendre la réforme d’ensemble des concours financiers de la CNSA aux départements, prévue pour 2025, l’État propose de soutenir les départements à hauteur de 150 millions d’euros supplémentaires l’année prochaine, en sorte qu’aucun ne soit compensé à moins de 40 % pour l’APA. Aurore Berger a insisté sur cette question d’équité territoriale. Elle a rappelé qu’en 2025 une réforme en profondeur sera menée, pour un soutien plus fort et plus lisible.
Les sénateurs ont approuvé ce soutien complémentaire dans un contexte de dépenses croissantes. Ils se sont toutefois interrogés sur cette mesure ponctuelle qui ne vaut que pour 2024 et ont regretté que la PCH ne soit pas visée.
Aurore Bergé a confirmé qu’il s’agissait d’un engagement continu, pour 2024 et au-delà. Elle a réitéré la refonte des fonds de concours pour plus de clarté, et l’État s’engage à financer 50 % des dépenses nouvelles via la CNSA.
- Création d’un service de repérage et d’orientation précoce des enfants de moins de 6 ans susceptibles de présenter un handicap
L’article 38 du projet de loi retenu après le 49.3 prévoit la création d’un service de repérage des enfants de moins de six ans susceptibles de présenter tout trouble de santé à caractère durable et invalidant et la prise en charge par l’assurance maladie d’un parcours de bilan, de diagnostic et d’intervention.
Les sénateurs ont adopté deux amendements afin d’éviter un empilement incohérent de dispositifs :
- Le nouveau service de repérage précoce devant s’appuyer sur le bilan de santé et de prévention réalisé lors de l’entrée d’un mineur dans le dispositif de protection de l’enfance, les sénateurs ont précisé la participation des services de l’aide sociale à l’enfance, dans la limite de leurs compétences.
- Les sénateurs ont en outre proposé d’inscrire dans la loi la limite d’âge de douze ans, actuellement prévue par décret, du parcours de bilan et intervention précoce pour l’accompagnement des enfants présentant un trouble du neurodéveloppement (TND)
La ministre a considéré que ces propositions étaient satisfaites d’où son avis défavorable.
- Expérimentation d’un dispositif de transition pour les jeunes en situation de handicap
Depuis 1989, l’amendement Creton permet le maintien dérogatoire des jeunes adultes dans les établissements et services pour enfants handicapés, faute de places dans les structures pour adultes. La croissance du nombre de bénéficiaires, 10 000 en 2023, contre 5 700 en 2014, crée de nombreuses difficultés.
Face à celles-ci, les sénateurs ont adopté l’amendement de la commission des Affaires sociales qui propose, à titre expérimental, l’accueil de jeunes en situation de handicap dès l’âge de 16 ans dans des dispositifs médico-sociaux de transition autorisés par l’agence régionale de santé (ARS) et le conseil départemental, sur orientation de la CDAPH. Ces jeunes y recevraient un accompagnement spécifique jusqu’à leur admission dans un établissement pour adultes.
L’expérimentation, d’une durée de quatre ans, ferait l’objet d’un rapport d’évaluation déterminant notamment les conditions de la pérennisation du dispositif.
La ministre a donné un avis défavorable. Selon elle, plutôt qu’un nouveau dispositif transitoire, la bonne réponse sera de créer les 50 000 nouvelles solutions – pour 1,5 milliard d’euros – annoncées lors de la Conférence nationale du handicap.
- Lutte contre la fraude sociale
Les sénateurs et le ministre se sont accordés sur l’intégration des agents des conseils départementaux aux échanges d’informations entre les agents de l’État et des organismes de protection sociale à des fins de lutte contre la fraude sociale.
Plus précisément, l’amendement voté à l’initiative de la sénatrice Nathalie Goulet (UDI-Orne) vise à permettre aux agents habilités par le Président du Conseil départemental de pouvoir échanger tous renseignements et tous documents utiles à l’accomplissement des missions de recherche et de constatation de fraudes sociales.
Dans le cadre du rapport de mission confiée par le Premier Ministre « Lutter contre les fraudes aux prestations sociales, un levier de justice sociale pour une juste répartition » remis en 2019, il avait été relevé que les départements étaient confrontés à de très grandes difficultés, d’autant plus que les départements limitrophes ne communiquent pas entre eux sur ces données.