Crise du logement : le Sénat dresse un constat sévère de la situation actuelle et propose des mesures audacieuses pour une refonte de la politique du logement

La mission d’information sur la crise du logement pilotée par les trois sénatrices Dominique Estrosi Sassone (LR, Alpes-Maritimes, également présidente de la mission d’information), Viviane Artigalas (PS, Hautes- Pyrénées) et Amel Gacquerre (Union centriste, Pas-de-Calais), a cherché à identifier les causes des difficultés et de proposer des solutions opérationnelles comme des réformes structurelles. Le rapport publié le 30 avril 2024 devrait permettre d’enrichir et de compléter le projet de loi présenté par le Gouvernement.

Chute de la construction, gel des transactions immobilières, enfants à la rue ou familles à l’hôtel, allongement des listes d’attente pour un logement social, autant de signes qui s’accumulent d’une crise du logement dont la gravité inquiète les professionnels et dont ils prédisent qu’elle pourrait s’approfondir en 2024 voire 2025.

Les sénatrices ont donc souhaité démêler l’écheveau des causes et des conséquences d’une crise du logement complexe et multifactorielle en raison notamment des difficultés de la promotion immobilières, du blocage du marché des ventes et du crédit, de la raréfaction de la location, de la cherté du foncier, des réticences à construire et à construire du logement social en particulier.

Elles ont souhaité également interroger la responsabilité du Gouvernement dans cette crise où il a pris plus de mesures pro-cycliques entravant les bailleurs sociaux ou la construction et l’investissement privé que contra-cycliques visant à amortir le choc et accompagner le secteur et les ménages.

Elles ont enfin identifié les propositions qui pourraient permettre de produire plus de logements en adéquation avec les besoins dans les zones tendues ou en réindustrialisation.

Présentation des propositions

Pour un effet à court terme :

  • Stopper l’attrition du marché locatif (réglementation des meublés de tourisme et repousser à 2028 au lieu de 2025 l’interdiction de louer des logements classés G prévue par la loi « Climat et résilience ») ;
  • Relancer l’accession à la propriété (revenir sur le recentrage du PTZ, la suppression de l’APL‑accession, et supprimer le caractère obligatoire des préconisations du Haut Conseil de stabilité financière) ;
  • Soutenir l’investissement locatif réalisé par les particuliers (exonération de droits de succession d’un logement neuf acquis en VEFA (dispositif temporaire) et extension aux particuliers des avantages concédés aux institutionnels pour le logement intermédiaire) ;
  • Relancer le logement social par un financement exceptionnel des bailleurs en fonds propres pour l’acquisition de programmes neufs ;

Pour un effet à moyen terme :

  • Simplifier (réduire les délais, paralléliser les démarches et réduire les recours, appliquer pleinement les PLU et les bonus de constructibilité, et généraliser les dérogations à l’exemple du village olympique) ;
  • Redonner la main aux élus locaux en matière de logement (extension des dérogations accordées aux zones tendues, détermination des zonages, part plus active dans l’attribution des logements sociaux, compensation intégrale et pérenne de l’exonération de TFPB, sécurisation juridique des « chartes promoteurs », réflexion sur le renforcement des autorités organisatrices de l’habitat, les AOH) ;
  • Mobiliser les réservoirs fonciers (faciliter la transformation de bureaux et des zones commerciales d’entrées de ville en logement, développer une stratégie foncière (OFS, DUP anti‑spéculation et adapter la trajectoire de ZAN dans les communes à fort besoin de logements) ;

Une refondation pour un impact à long terme :

  • La rédaction d’un livre blanc aboutissant à une loi de programmation. Il s’agit de préparer des décisions politiques sous contrainte temporelle et financière sur la base d’un consensus sur le besoin en logements ;

Cette refondation aurait trois objectifs majeurs :

  • Offrir un logement pour tous en redéfinissant l’appui de la nation aux bailleurs sociaux, en réaffirmant le modèle du logement social et l’importance du lien emploi‑logement en termes de priorité d’attribution et de gestion de la PEEC ;
  • Débloquer le parcours résidentiel des classes moyennes (soutien actif à l’accession, renforcement du PTZ, développement de formules progressives comme cela existe à l’étranger) ;
  • Reconnaître la contribution sociale et économique du bailleur privé à travers un statut comme producteur et fournisseur d’un service de logement (non‑assujettissement des biens en location longue durée, éventuellement sous condition de loyer, à l’IFI et amortissement fiscal de l’investissement locatif comme c’est le cas en Allemagne, garanties suffisantes aux loueurs longue durée).

Accédez à la synthèse du rapport :

https://www.senat.fr/rap/r23-567/r23-567-syn.pdf

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