L’épidémie de Covid-19 continue de toucher de plein fouet notre pays. La gestion de la crise sanitaire à l’occasion des deux premières vagues avait démontré, dès le mois de mars, que l’on savait pouvoir compter sur la proximité, l’agilité, la réactivité et l’expertise des Départements. Face au regain de l’épidémie qui frappe la France et l’Europe, les Départements répondent présent pour soutenir les plus vulnérables de nos concitoyens, accompagner les collégiens, contribuer à la continuité de service public… des réponses opérationnelles pour tenter d’endiguer les conséquences d’une crise sanitaire qui s’annonce déjà dramatique dans les domaines économiques et sociaux.
Acteurs de proximité par excellence, les Départements constituent l’échelon le plus adapté pour mener des politiques opérationnelles et intervenir en local aux côtés des Maires, des Préfets et des acteurs de terrain. Que ce soit l’apport de moyens techniques (laboratoires d’analyses départementaux, SDIS…), le développement de politiques d’aménagement du territoire et de services à la population, ou à travers leurs compétences de gestion des routes ou des collèges, les Départements s’appuient sur leurs points forts pour agir. Ces derniers mois, les publications universitaires ont d’ailleurs fait la part belle aux Départements, le docteur en géographie Laurent CHALARD les citant comme « la meilleure grille de lecture du territoire français ».
Des réponses départementales en lien avec l’aménagement du territoire
Pendant les deux premières phases de confinement et aujourd’hui encore, les Départements ont développé des réponses adaptées dans leurs champs de compétences. La crise a montré la résistance des collectivités territoriales, leur capacité à intervenir rapidement, en proximité. Les Départements ont mobilisé des dispositifs d’aide d’urgence, adopté des plans exceptionnels de soutien, engagé des plans départementaux de relance, afin de soutenir les publics plus vulnérables.
- Dans le domaine de la santé :
Bien qu’il ne s’agisse pas de leurs missions centrales, les Départements mènent depuis longtemps des actions en faveur de l’accès aux soins notamment pour lutter contre les déserts médicaux (développement de la télémédecine, financement de maisons de santé pluridisciplinaires, embauche de médecins…). Dans ce contexte, ils ont cherché à répondre aux demandes urgentes en apportant un soutien aux personnels et aux aidants, à travers notamment l’achat et la distribution de masques et autres équipements de protections individuelles pour faire face à une pénurie généralisée à l’échelle nationale lors de la première vague.
La mobilisation des laboratoires départementaux d’analyse a par ailleurs permis de produire du gel hydroalcoolique et de participer au dépistage de la Covid-19 (tests PCR), à travers des campagnes massives menées dans les Ehpad. Si l’on regrette le temps perdu en mars pour obtenir l’autorisation administrative de procéder à ces analyses, une trentaine de LDA actifs ont finalement participé largement à la stratégie nationale de dépistage, avec près de 25 000 tests par jour au plus fort du rebond épidémique.
Le lancement de la campagne de vaccination du début d’année 2021 est également l’occasion pour les Départements de proposer des solutions locales afin d’en accélérer et faciliter l’organisation. La vaccination dans plusieurs Départements de nombreux personnels de SDIS a permis d’assurer la continuité des services publics et d’apporter une aide logistique précieuse pour la mise en place de centres de vaccination. De nombreux Départements ont également favorisé l’accès aux centres de vaccination : par la mise en place de chèques mobilité ou par la réquisition de véhicules des services départementaux afin d’assurer le transport des personnes de plus de 75 ans vivant dans des zones isolées. Certains départements, enfin, ont formé des « ambassadeurs » locaux permettant de créer une dynamique de confiance face à la réticence de certains français vis-à-vis du vaccin.
Néanmoins, les associations d’élus locaux ont dénoncé le manque de visibilité concernant l’organisation logistique de la campagne vaccinale. Dès le 4 décembre, à l’annonce du lancement de la campagne de vaccination, les présidents de l’AMF, de l’ADF et de Régions de France, à travers une déclaration commune de Territoires Unis, ont rappelé au Premier Ministre et au ministre de la Santé le rôle primordial que doivent jouer les collectivités. Elles seules disposent d’une connaissance aussi fine des publics les plus fragiles et de moyens logistiques importants pour mettre en œuvre les dispositifs de vaccination à l’échelle locale. Près de deux mois plus tard, dans une nouvelle déclaration commune adressée le 25 janvier au Premier Ministre, les élus de Territoires Unis font le constat : l’absence de moyen mais surtout de visibilité ont conduit à une campagne vaccinale lente et désorganisée, alors que de nombreux centres ferment faute de vaccins à administrer… L’amélioration de cette situation, pour la santé des français et le retour rapide à une vie « normale », doit assurément passer par une meilleure coordination avec les collectivités, qui reçoivent aujourd’hui des informations contradictoires et au compte-goutte.
- En matière d’action sociale et médicosociale :
La proximité constitue, tout particulièrement en ces temps perturbés, un atout majeur pour maintenir le lien, l’accès aux droits et la qualité de services prodigués aux personnes, qu’il s’agisse de nos aînés, des personnes en situation de handicap, des victimes de violences intrafamiliales ou des dispositifs de protection de l’enfance. Cœur de métier des Départements, ceux-ci ont adapté leur mode de fonctionnement, dans le respect des règles les plus strictes de sécurité et de protection, afin de maintenir leur activité, indispensable en période de crise sociale : accueils adaptés dans les MDPH, renforcement des moyens humains et financiers auprès des Ehpad, lutte contre l’isolement des personnes, dispositifs d’aide alimentaire d’urgence, soutien aux associations, etc.
Malgré une amélioration des dispositifs entre le premier confinement de mars 2020 et le second épisode automnal, des défaillances continuent d’entraver la politique de dépistage et de vaccination. L’enchevêtrement des compétences, les cloisonnements institutionnels ainsi que la trop grande distance avec les ARS (du fait de leur périmètre géographique conséquent et de leur culture administrative) justifient aujourd’hui une réorganisation des rôles et des missions respectives dans les secteurs sociaux, médicosociaux et sanitaires. L’ADF a de longue date fait des propositions concrètes dans de nombreux domaines en demandant la gestion du bloc médicosocial par les Départements.
- En matière d’aménagement et d’usages numériques :
Télétravail, télémédecine, accès à l’éducation ou lutte contre l’isolement, le numérique est apparu clairement à tous comme un outil de lien et de solidarité aussi indispensable que l’eau et l’électricité. Les Départements ont su innover pour répondre dans l’urgence et de manière pragmatique et ciblée à des besoins ponctuels ou sectoriels.
Acteurs majeurs dans l’aménagement numérique des territoires, les Départements ont poursuivi et amplifié leurs actions pour favoriser les déploiements de couverture fixe et mobile, avec leurs délégataires et les opérateurs privés.
Ils ont aussi permis d’assurer la continuité pédagogique à distance. Les mises à disposition de matériels informatiques chez les collégiens et la montée en charge des plateformes ENT (environnements numériques de travail) ont été décisives pour maintenir les collégiens dans une dynamique d’apprentissage.
A terme, l’effort engagé sur les infrastructures numériques va s’accompagner d’un effort équivalent pour le développement des usages et d’une culture numérique pour le plus grand nombre, dont les Départements doivent être les maîtres d’œuvre et les coordonnateurs sur les territoires.
- Aménagement et équipement des collèges :
En cette période si particulière, le rôle clé des Départements qui assurent la construction, la rénovation, l’entretien, l’équipement et la sécurisation des collèges a été renforcé par la crise sanitaire. Au-delà de l’équipement numérique, les Départements ont fait preuve de réactivité pour équiper en masques gratuits leurs personnels et les collégiens, revaloriser les bourses départementales accordées aux collégiens, et sécuriser les établissements pour pouvoir assurer, dès le mois de juin, un retour en classe pour plusieurs centaines de milliers d’élèves. Les nouvelles organisations ont induit des dépenses et un travail supplémentaires pour les agents (accueil prolongé, nettoyage amplifié, services de restauration augmentés) mettant particulièrement en tension les services.
L’ouverture des établissements est assurée dans le respect des protocoles sanitaires, permettant ainsi à tous de bénéficier d’un enseignement en présence de l’enseignant et d’éviter d’accentuer encore un peu plus le décrochage scolaire. Les personnels départementaux dans les collèges sont présents pour accompagner ce maintien de l’activité dans les meilleures conditions et de façon adaptée dans chaque établissement.
Cartographies départementales de la vaccination
Dans le cadre de la campagne de vaccination nationale contre la covid-19, le gouvernement a mis en place, depuis fin janvier, une plateforme en ligne permettant de diffuser des statistiques quotidiennes sur le nombre de personnes vaccinées par âge et catégorie. Cette transparence d’information fait notamment suite aux demandes des associations d’élus de Territoires Unis (AMF, Régions de France et ADF) qui, dès le début de la vaccination, ont sollicité auprès du Premier Ministre la mise en place de ce type de plateforme.
L’ADF a souhaité mettre à la disposition des collectivités une cartographie de la vaccination construite sur ces bilans quotidiens, mise à jour à rythme hebdomadaire, dans le but de clarifier le déploiement de la vaccination sur le territoire. Ces cartes permettent d’établir la couverture vaccinale des différentes catégories de populations prioritaires, c’est-à-dire la proportion de personnes vaccinées sur l’ensemble de la population considérée, par Département. Elles sont disponibles sur cette page : https://www.departements.fr/cartographies-departementales-de-vaccination-2/
Ces cartes ne sont pas totalement exhaustives, d’autant que les chiffres de la vaccination changent tous les jours et ne connaissent pas une progression linéaire, mais sont corrélés aux variations de stock. Elles permettent néanmoins de rendre compte, presque en temps réel, du déploiement de la vaccination à l’échelle du territoire national.
Les attentes vis-à-vis des pouvoirs publics
La crise de la Covid-19 agit comme un révélateur des dysfonctionnements et comme un accélérateur de mutation ; elle bouleverse profondément les paramètres économiques et sociaux qui régissaient la vie des collectivités et leur rapport avec l’Etat…. D’ores et déjà, l’ADF appelle à la prise en compte des demandes suivantes :
- Le besoin d’une nouvelle étape de décentralisation :
Les grandes politiques publiques doivent être conçues avec les collectivités locales. Leur connaissance majeure des territoires, de leurs besoins et la mise en réseau des acteurs locaux est essentielle pour intervenir de façon efficace, efficiente et réactive. Le temps n’est-il pas venu d’une vraie décentralisation notamment dans les domaines médico-social et l’hospitalier ?
- La prise en compte des Départements dans le plan de relance :
Le plan de relance de 100 milliards d’euros engagé par le gouvernement vise des projets porteurs d’emplois, s’inscrivant notamment dans la transition environnementale. Les Départements entendent y prendre toute leur part dans des domaines particulièrement stratégiques en lien avec leurs compétences : l’entretien des routes et des ouvrages d’art, la réhabilitation des bâtiments (administratifs, collèges, logements, Ehpad), l’aménagement et les usages numériques, les circuits courts et la transition écologique dans l’agriculture, ainsi que l’insertion des jeunes.
La mise en œuvre du plan de relance pose la question de sa territorialisation. L’ADF a formulé plusieurs demandes auprès du Gouvernement pour une véritable prise en compte des Départements dans le plan de relance, notamment :
- Une contractualisation spécifique aux Départements, à l’image de ce qui a été fait pour les Régions, permettant de donner de la visibilité aux politiques d’investissement à engager à court terme. L’ADF a obtenu que les Préfets de département soient mobilisés pour signer des contrats de relance départementaux avec les Présidents de Départements, conformément à leur mission de chefs de file de la solidarité territoriale, afin d’unir et de coordonner leurs investissements respectifs. Cette décision a été entérinée par un constat d’accord de méthode signé entre le Premier Ministre et le Président de l’ADF le 12 décembre dernier à la Rochelle.
- Une réelle association des Départements à l’élaboration et au suivi de la réalisation des CPER qui doivent devenir de véritables outils du plan de relance. Les CPER pourraient devenir utilement des « contrats de territoires » (CPET).
- La possibilité pour les Départements de soutenir le redémarrage et la relance de l’activité :
Des milliers d’entreprises et des centaines de milliers d’emplois sont menacés. Face à la crise sociale et à la flambée du nombre de bénéficiaires du RSA, les Départements sont appelés à jouer les « pompiers sociaux ». Cette situation justifie à l’évidence un plan de redémarrage et de relance très puissant associant tous les acteurs économiques et tous les échelons de collectivités.
Dès le début, et ce malgré les contraintes budgétaires, de nombreux Départements se sont activement impliqués pour soutenir l’économie locale sous des formes diverses : plans de relance départementaux, soutien au tourisme, au bloc local, aux associations, valorisation et développement des circuits courts, etc. Toutefois, le flou juridique qui a régné durant les premiers mois de la crise sur la mise en place des fonds de solidarité (fonds national de solidarité et fonds régionaux) a empêché les Départements d’être aussi réactifs qu’ils ne l’auraient souhaité.
Force est de constater que la loi NOTRe ne constitue pas un cadre adapté à la gestion de crise et aux politiques de relance. Elle apparaît comme un frein à l’investissement pour les Départements qui souhaitent soutenir l’économie locale de proximité (commerces, artisans, agriculteurs, petites entreprises), un appui pourtant essentiel sans quoi certains territoires resteront gravement sinistrés. L’ADF avait ainsi demandé au Gouvernement que les interventions économiques des Départements pour le temps de la crise soient sécurisées et ne soient pas déférées par les Préfets.
Pour répondre aux situations les plus urgentes et soutenir le tissu économique local, plusieurs Départements ont instauré des aides sociales exceptionnelles, en direction des travailleurs non-salariés (petits et micro-entrepreneurs, professions libérales, travailleurs indépendants…) dont l’activité professionnelle a été fortement perturbée par la crise sanitaire qui les a privés de revenus.
- La volonté de « défendre nos commerces de proximité » :
Nombre d’élus locaux et de sénateurs se sont exprimés lors du second confinement, afin de relayer la « colère légitime grandissante » de certains secteurs économiques. Artisans et commerçants, librairies ou encore fleuristes ont été les victimes incontestables d’une situation de dualité privilégiant de fait la grande distribution et les plateformes numériques de vente en ligne. L’implication des élus locaux a sans aucun doute participé à la décision de réouverture du 28 novembre 2020. Face à la menace d’une reprise épidémique aboutissant à des mesures de restriction supplémentaires, l’engagement des Départements se poursuit pour sauver un tissu économique local fragile.
Bien que privés pour le moment de moyens d’actions, les Départements restent pleinement mobilisés dans cette phase d’incertitude, comme ils l’ont toujours été depuis le début de la crise. Pour autant, cette capacité à remplir leurs missions de solidarités humaines et territoriales comme à contribuer à la relance du Pays ne sera pas possible sans garantir la soutenabilité financière des Départements. Aussi l’ADF a réitéré un certain nombre de demandes auprès du Gouvernement : compensation d’une partie des pertes de DMTO, prise en charge de l’augmentation du RSA au-delà de 5%, aide au maintien de la péréquation horizontale, etc. Un appui indispensable pour poursuivre leurs actions au plus proche des Français.