Pour encourager les collectivités à s’emparer de l’Agenda 2030 et de ses 17 objectifs de développement durable, le Comité 21 diffuse un guide détaillant à la fois la philosophie et l’intérêt de la démarche et la façon de l’aborder localement. L’association met en avant les atouts de ce référentiel universel pour « donner du sens » à l’ensemble des politiques locales, mais aussi aux programmes des candidats aux municipales. Et encourage les collectivités à éviter le « ODD washing », à faire preuve d’ambition pour le développement durable de leur territoire. D’un point de vue méthodologique, le Comité 21 souligne la continuité entre l’Agenda 21 et l’Agenda 2030.
Le Comité 21 vient de sortir son guide « Pour l’appropriation de l’Agenda 2030 par les collectivités françaises », qu’il a présenté à l’occasion des Congrès et Salon des maires. Deux mois après l’adoption de la feuille de route française pour l’Agenda 2030 (voir notre article du 23 septembre 2019) et à l’approche des élections municipales, le Comité 21 et ses partenaires (1) – dont le Cerema, la Banque des Territoires, six associations d’élus et de collectivités, les ministères de l’Europe et des Affaires étrangères et de la Transition écologique et solidaire, ou encore Le Rameau – entendent aider les collectivités locales à entrer de plain-pied dans le référentiel des 17 objectifs de développement durable (2) adoptés par les pays membres de l’ONU en 2015.
« Les ODD, ce n’est pas un ‘truc en plus’, c’est la grille qui donne du sens au reste »
« L’appropriation de l’Agenda 2030 doit être avant tout locale », pour Bettina Laville, présidente du Comité 21. D’abord parce que les collectivités disposent de nombreux leviers. Ensuite parce qu’elles peuvent faire le lien entre les dimensions internationale et nationale et les citoyens. Pour ces derniers, les objectifs de développement durable peuvent paraître d’ailleurs plus faciles à appréhender que les Sraddet, Scot, PCAET, et autres outils locaux de planification aux noms barbares. « Les ODD, instruments non contraignants, offrent aux différents schémas une ‘trajectoire de sens’, permettant aux citoyens une projection dans l’avenir, cohérent avec celui du monde », écrit Bettina Laville dans la préface du guide. « Les ODD, ce n’est pas un ‘truc en plus’, c’est la grille qui donne du sens au reste », a-t-elle dit plus simplement le 20 novembre au Salon des maires.
Autre intérêt éventuel pour une collectivité d' »inscrire son action locale dans la mise en œuvre des ODD » : se donner une chance supplémentaire d’accéder aux « fonds internationaux et grands bailleurs (Caisse des Dépôts, Agence française de développement, fonds européens…) » se référant de plus en plus à l’Agenda 2030 « pour évaluer l’impact des projets ». Mais « attention à l’ODD washing ! », alerte le Comité 21, pour qui la démarche a une vocation « transformatrice ». Pour « dépasser le stade de la coloration ODD de son rapport annuel de développement durable (…), il convient d’interroger chaque action au regard de sa contribution à chacun des ODD pour vérifier son niveau d’adéquation », peut-on lire dans le guide. L’exemple cité : une infrastructure permettant de relier deux quartiers répond à l’ODD 9 (« Bâtir une infrastructure résiliente… ») et « doit prendre en compte la nécessaire protection de la biodiversité » énoncée dans l’ODD 15 (« Préserver et restaurer les écosystèmes terrestres… »). Le conseil départemental de la Gironde se serait notamment plié à l’exercice.
Commencer par les « ODD cœur de métier » et essayer d’aller au-delà
Très détaillé, le guide est conçu pour répondre à toutes les questions des élus et agents qui ne sauraient pas comment aborder une telle démarche. Une partie est dédiée à la structuration d’une stratégie d’ensemble, avec notamment une « roue des ODD » mettant en avant les « dispositifs et programmes locaux pouvant concourir aux ODD » et un focus sur les indicateurs d’évaluation. La partie suivante est consacrée à la mise en œuvre de chaque objectif, identifiant des « ODD cœur de métier » pour chaque niveau de collectivité. « Pour établir leurs priorités ou leur programme pour les élections, les exécutifs ou candidats peuvent commencer par leurs ODD cœur de métier », a expliqué à Localtis Sarah Schönfeld, directrice du Comité 21. « Mais l’esprit, in fine, est d’essayer de tous les embrasser, de les travestir aussi pour que ça parle à la réalité du territoire », a-t-elle complété, citant la ville de Strasbourg qui a créé un « 18e ODD » sur la culture.
Une dernière partie présente les démarches d’appropriation des ODD conduites dans sept « territoires pionniers » : deux régions (Bourgogne-Franche-Comté et Nouvelle-Aquitaine), le département de la Gironde, la métropole de Perpignan, les villes d’Ayen (Corrèze, 700 habitants), Niort (Deux-Sèvres, 60.000 habitants) et Saint-Fons (Rhône, 18.000 habitants).
De l’Agenda 21 à l’Agenda 2030 : une continuité sur le plan méthodologique
Le Comité 21 et ses partenaires considèrent ainsi que tout type de collectivité peut se pencher sur l’Agenda 2030. Alors que des Agendas 21 locaux ont pu s’essouffler au fil des mandats et du fait d’une perte de reconnaissance de l’Etat, la méthode de l’Agenda 21 – mobilisation des acteurs, diagnostic concerté, plan d’actions régulièrement revisité… – reste tout à fait valable pour territorialiser les ODD, selon Sarah Schönfeld. Sur la question des finalités, l’Agenda 2030 avec ses 17 ODD et ses 169 cibles détaille de façon beaucoup plus précise les cinq finalités de l »Agenda 21″, peut-on lire dans le guide. Au sein des collectivités, la démarche doit être « portée politiquement au plus haut niveau » et irriguer l’ensemble des directions et services, estime la directrice du Comité 21. De son point de vue, « les ODD sont un bon outil pour faire prendre conscience que le développement durable, ce n’est pas que l’environnement ».
Des associations telles que « Notre village » aident actuellement des petites communes et intercommunalités à faire évoluer leur Agenda 21 vers un Agenda 2030 local. Le Comité 21 poursuit de son côté son « Tour de France des ODD » et propose des formations et accompagnements, dont des ateliers collectifs sur « les nouveaux outils de la transition territoriale ». Bettina Laville espère enfin que ce guide soit « un guide de campagne » pour tous les candidats aux prochaines élections municipales.
(1) Les partenaires du Comité 21 pour l’élaboration du guide : Assemblée des départements de France (ADF), Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF), Association des petites villes de France (APVF), Banque des Territoires, Cerema, Cités Unies France, Délégation pour l’action extérieure des collectivités territoriales (DAECT) du ministère de l’Europe et des affaires étrangères (MEAE), Le Rameau, ministère de la Transition écologique et solidaire (MTES), Association nationale Notre village, Partenariat Français pour l’Eau (PFE), Programme des nations unies pour le développement (PNUD), Régions de France, Villes de France.
(2) Les objectifs de développement durable (ODD) sont : pas de pauvreté, faim « zéro », bonne santé et bien-être, éducation de qualité, égalité entre les sexes, eau propre et assainissement, énergie propre et d’un coût abordable, travail décent et croissance économique, industrie innovation et infrastructure, inégalités réduites, villes et communautés durables, consommation et production responsables, mesures relatives à la lutte contre les changements climatiques, vie aquatique, vie terrestre, paix justice et institutions efficaces, partenariats pour la réalisation des objectifs.