Mettre à contribution les EHPAD privés à but lucratif réalisant des profits excessifs : une proposition de loi déposée au Sénat

Selon les sénateurs PS, le livre de Victor CASTANET « Les fossoyeurs » a provoqué une véritable déflagration dans notre pays. La financiarisation dans le domaine de la santé et en particulier dans celui des EHPAD est apparue dans toute sa crudité.

Au-delà même du scandale ORPEA, on observe la place croissante des groupes privés dans le secteur des EHPAD. Entre 1986 et 2015, le nombre de places en établissements médico-sociaux médicalisés s’est accru de 85 % ; sur la même période, le nombre de places dans le secteur privé lucratif s’est accru de + 560 %.

La prise en charge des personnes âgées est malheureusement de plus en plus un secteur économique comme les autres avec une emprise croissante des fonds de capital investissement. Les cinq plus grands groupes français sont détenus par ces fonds. Les sénateurs PS observent que le fondateur d’ORPEA a plus de 1 milliard d’euros de patrimoine et les plus grands groupes français d’EHPAD privés sont dans le top 500 des plus grandes fortunes françaises.

En conséquence, ils estiment plus que jamais nécessaire de réguler les superprofits qui perdurent dans le secteur des EHPAD privés à but lucratif.

Le modèle économique des EHPAD repose en grande partie sur de l’argent public : sommes versées directement aux EHPAD par les Agences Régionales de Santé pour les soins et par les conseils départementaux pour la dépendance.

En France, il n’y a pas de liberté d’installation des EHPAD, l’État agrée l’ouverture de structures en fonction des besoins des populations. Cet agrément est totalement gratuit alors même que les subventions publiques annuelles représentent environ 40 % du chiffre d’affaires des EHPAD privés à but lucratif.

Les sénateurs PS considèrent totalement logique de taxer les superprofits réalisés par les EHPAD privés lucratifs. Seront assujettis à cette nouvelle taxation les EHPAD privés lucratifs dont la rentabilité financière dépasse un certain seuil. La rentabilité financière serait calculée en divisant le résultat net par les capitaux propres d’une entreprise. Elle permettrait d’apprécier quel bénéfice est dégagé pour chaque euro investi dans une entreprise par les actionnaires.

Le seuil de déclenchement de cette nouvelle taxation des EHPAD privés lucratifs serait fixé au taux de 10 % de rentabilité financière. Les données de la Banque de France et de l’INSEE indiquent que la rentabilité financière des PME était en 2021 de 11,5 %, celle des entreprises de taille intermédiaire (ETI) de 8,3 % et celle des grandes entreprises de 11,2 %. Une rentabilité de 10 % peut être considérée comme satisfaisante et suffisante pour des entreprises à vocation sociale.

Pour plus de simplicité, la taxation prendrait la forme d’une contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés, impôt dont le taux de droit commun est aujourd’hui fixé à 25 % en application de l’article 219 du code général des impôts.

Cette contribution additionnelle à l’impôt sur les sociétés serait progressive avec deux tranches : pour la première tranche, la contribution est égale à 20 % du montant de l’impôt sur les sociétés acquitté par l’EHPAD privé à but lucratif lorsque le résultat net de l’établissement est supérieur à 10 % du montant des capitaux propres de l’entreprise. Ce taux serait porté à 30 % en cas de rentabilité supérieure à 15 %.

Le produit de cette contribution additionnelle serait affecté à la CNSA, garantissant ainsi son utilisation pour financer des mesures en faveur des personnes handicapées ou des personnes âgées dépendantes.

Accédez à la proposition de loi :

https://www.senat.fr/leg/ppl23-682.html

Partager l'article