Paupérisation des copropriétés immobilières : un phénomène mal connu qui bouge et s’amplifie selon le Sénat

La commission d’enquête du Sénat a rendu publiques ses conclusions le 23 juillet dernier. Elle appelle à mieux connaître la paupérisation des copropriétés pour mieux la combattre après l’audition d’une centaine d’acteurs et plusieurs déplacements de terrain. 47 recommandations sont présentées et seront communiquées au prochain Premier ministre.

C’est en effet un phénomène dont on commence seulement à prendre toute la mesure alors que la copropriété regroupe environ un tiers des résidences principales. Pourtant les copropriétés restent mal connues. Si 578 000 sont immatriculées au registre national, plus de 300 000 ne le seraient pas encore selon les dernières données de l’Anah et du CEREMA. Or, tout laisse à penser que ce sont les plus petites et les moins bien gérées sur lesquelles il y a le moins d’information.

Les chiffres sur les copropriétés en difficulté ne permettent pas non plus d’avoir une photographie précise. La Banque des territoires a avancé l’évaluation de 215 000 copropriétés ayant un montant d’impayé d’au moins 20 % de leur budget annuel. 35 % des copropriétés auraient un DPE de classe F ou G, et, en Île-de-France, la moitié des logements indignes seraient en copropriété selon l’Anah.

Une copropriété ne naît pas fragile, elle le devient. Le vieillissement des immeubles et les difficultés des copropriétaires jouent un rôle important, le parc privé accueillant deux tiers des ménages situés sous le seuil de pauvreté, la moitié d’entre eux étant propriétaires occupants.

Sur environ 750 000 copropriétés en France, l’Agence nationale de l’habitat (Anah) avait estimé que 150 000 seraient en difficulté. Par ailleurs, dans leur récent rapport, Matthieu Hanotin, maire de Saint-Denis, et Michèle Lutz, maire de Mulhouse, indiquaient qu’il y aurait en métropole 400 000 logements indignes dont la moitié est occupée par leur propriétaire.

Ces propriétaires n’ont ni les moyens de faire les travaux, ni les moyens de partir et demeurent propriétaires d’un mal-logement avec de graves conséquences sanitaires et sociales.

Le cycle vicieux peut rapidement s’enclencher, entraînant la dégradation des locaux, la dévalorisation du bien, l’arrivée de copropriétaires plus pauvres mais aussi de marchands de sommeil. Ces copropriétés deviennent un « parc social de fait » et sont l’un des symptômes de la crise du logement et de l’hébergement.

Or, face à ce phénomène, les outils disponibles ne sont pas toujours utilisés et les pouvoirs publics peinent à détecter, prévenir ou contrer la paupérisation.

Certaines difficultés sont liées à la loi de 1965 elle-même, plus proche de l’organisation d’une indivision que d’une société par actions.

Les pouvoirs publics ont mis en place une panoplie d’outils d’intervention. Les plus emblématiques sont les opérations de requalification de copropriétés dégradées (ORCOD) dont cinq sont d’intérêt national, les ORCOD IN, et le Plan initiative copropriétés (PIC) mobilisant les grands acteurs du logement et doté de 3 milliards d’euros pour traiter un nombre limité de grands ensembles en souffrance.

En revanche, la prise en charge des copropriétés en zone diffuse à travers la mosaïque des outils existants est beaucoup plus problématique faute de moyens suffisants ou s’inscrivant dans des durées adaptées. Les petites copropriétés, quelle que soit la taille des communes, sont bien dans un angle mort des politiques publiques actuelles.

Afin de remédier à cette situation fortement dégradée et améliorer la vie des habitants, le Sénat présente 25 recommandations. Parmi celles-ci :  faciliter le recours aux Fonds de solidarité pour le logement (FSL) au profit des copropriétaires pauvres pour faire face aux charges.

Consultez la synthèse du rapport :

https://www.senat.fr/rap/r23-736-1/r23-736-1-syn.pdf

Consultez le rapport :

https://www.senat.fr/rap/r23-736-1/r23-736-1_mono.html

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