Alain LAMBERT, ancien ministre du Budget, président du Conseil général de l’Orne, vient d’être nommé médiateur des normes applicables aux collectivités locales par le Gouvernement (décret du 11 mars 2014). Le médiateur a été institué par un décret du 7 mars 2014.
« Cette fonction qui m’est est aujourd’hui confiée se situe dans le prolongement de ma présidence de la Commission Consultative d’Evaluation des Normes mais aussi des travaux et réflexions menées avec Jean-Claude BOULARD pour limiter l’impact des normes sur la conduite de l’action publique efficace et ambitieuse voulue par nos élus » écrit Alain LAMBERT sur son blog.
Placé auprès du Premier ministre, il pourra être sollicité par les collectivités locales et leurs groupements par l’intermédiaire du Préfet du département. Sa mission : analyser les difficultés rencontrées lors de l’application des normes puis émettre des propositions ou des recommandations aux administrations concernées.
L’ancien sénateur de l’Orne, âgé de 67 ans, est déjà le président de la Commission consultative d’évaluation des normes (CCEN) au Comité des finances locales, depuis 2008. Un récent rapport de la commission qu’il préside, montre ainsi que les nouvelles dispositions créées en 2012 ont coûté plus d’1,5 milliard d’euros aux collectivités locales (contre 577M€ en 2010, 728 M€ en 2011).
Evoquant sa mission, Alain LAMBERT précise :
« C’est une tâche d’autant plus importante que l’excès de normes complique sérieusement la vie et le quotidien des élus locaux et coûte très cher, au final, à tout le monde, et notamment aux contribuables. »
Chaque année, plus de 300 normes sont édictées soit une par jour ouvré. En 2011, elles concernaient pour un tiers la revalorisation de la fonction publique territoriale et un autre tiers le social. Elles sont pour moitié des mesures réglementaires d’application de lois ou de directives européennes (50,5% en 2011). Pour limiter la production des normes et leurs coûts induits, Alain Lambert, en tant que Président de la CCEN, a proposé plusieurs pistes, parmi lesquelles l’introduction d’un principe d’adaptabilité des normes dans le droit administratif français, ou encore une production de normes selon le principe du prescripteur/payeur.
Sous ses allures de notaire de province, se cache un iconoclaste connu pour sa passion pour les nouvelles technologies. Twitter n’a plus aucun secret pour lui qui s’est fait remarquer quand il était au gouvernement pour avoir pris des photos de conseils de ministres. Ministre du budget dans le gouvernement de Jean Pierre RAFFARIN (2002-2004), ce partisan d’une stricte orthodoxie budgétaire a volontiers assumé son statut de « poil à gratter » de la majorité se targuant d’être le seul à lui tenir le langage de la vérité. Avant les nouvelles technologies, la vraie passion d’Alain Lambert, ce sont les finances publiques. En 2002, avec Didier MIGAUD, ils initient la Lolf, la loi organique relative aux lois de finances. La même année, il devient ministre du Budget et se retrouve face à un cauchemar, le déficit budgétaire.
De 2002 à 2004, il se bat « contre des moulins à vents » et huit ans plus tard, n’a rien perdu de son obsession pour la lutte contre les déficits. Sur les grands enjeux fiscaux du moment, Alain LAMBERT plaide pour la suppression conjuguée du bouclier fiscal et de l’ISF. Contrairement à plusieurs membres de l’UMP et du PS, favorables à une fusion de l’impôt sur le revenu avec la CSG, il y est farouchement opposé : « Cela aboutira à des pertes de ressources fiscales parce que ceux qui n’accepteront plus la progressivité de l’impôt social partiront. (…) Les impôts, ce n’est pas une question de morale mais de rendement. »
Concernant les niches fiscales, un marronnier tant du gouvernement que de la presse, le président du Conseil général de l’Orne propose des niches à durées déterminées lorsqu’elles ont une justification économique, et leur suppression dans le cas contraire. Son nom a circulé pour la tête de la Cour des comptes. C’est finalement le socialiste Didier MIGAUD, avec qui il a créé la LOLF (loi organique relative aux lois de finances), le dispositif budgétaire qui a pour but de fixer des objectifs à l’action de l’État, qui a été nommé et qui est devenu le gardien de « l’orthodoxie » des comptes de la nation. Alain LAMBERT n’a pas hésité à quitter le Sénat pour l’y rejoindre. Pour lui, Médiateur, c’est un autre combat qui l’attend. A coup sûr pas plus aisé.
P.B