Une dizaine de Sdis sont déjà candidats à l’expérimentation du port de caméras-mobiles pour les pompiers en intervention, comme le permet un décret publié au Journal officiel du 19 juillet. Un moyen de lutter contre les agressions dont les pompiers sont victimes. Celles-ci ont triplé en dix ans. Pour autant, la Fédération nationale des sapeurs-pompiers en relativise la portée, tant qu’il ne sera pas possible d’utiliser les caméras au domicile.
Aux grands maux, un moindre remède… Un décret publié au Journal officiel le 19 juillet autorise les sapeurs-pompiers, à titre expérimental jusqu’au 5 février 2022, à utiliser des caméras-mobiles (ou caméras-piétons) lors de leurs interventions. Ce décret est pris en application de la loi du 3 août 2018 relative à l’harmonisation de l’utilisation des caméras-mobiles par les autorités de sécurité publique qui avait également permis une expérimentation chez les surveillants de prison et pérennisé l’usage de ces caméras pour les policiers municipaux.
« Dix services d’incendie et de secours et la Brigade des sapeurs-pompiers de Paris sont d’ores et déjà candidats », se félicite le ministre de l’Intérieur, dans un communiqué du 19 juillet. Il s’agit par ce moyen de lutter contre les agressions de plus en plus fréquentes contre les pompiers. Celles-ci ont plus que triplé en dix ans, selon les chiffres de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales. En 2017, elles ont connu une augmentation de 23%. Selon le ministère, « trois fois par jour, les sapeurs-pompiers sont victimes d’agressions partout en France ».
Les interventions à domicile exclues
Les pompiers pourront ainsi procéder à un enregistrement de leur intervention « lorsque se produit ou est susceptible de se produire un incident de nature à mettre en péril leur intégrité physique, eu égard aux circonstances de l’intervention ou au comportement des personnes concernées », précise le décret. Ces enregistrements ont trois finalités : « la prévention des incidents au cours des interventions des agents » ; « le constat des infractions et la poursuite de leurs auteurs par la collecte de preuves » ; « la formation et la pédagogie des agents ».
La demande d’expérimentation est adressée par le président du conseil d’administration du Sdis (service départemental d’incendie et de secours) au préfet du département (ou au préfet de police pour Paris et Marseille). Le décret, qui est passé devant la Cnil, donne la liste des personnels habilités à visionner les images. La loi de 2018 prévoit en outre que les caméras doivent être portées de « façon apparente » et qu’ « un signal s’allume au moment de l’enregistrement ». Mais surtout l’enregistrement « ne peut être déclenché dans les cas où il est susceptible de porter atteinte au secret médical ». Ce qui est le cas de toutes les interventions à domicile en cas de secours à personnes.
Campagne de communication à la rentrée
L’augmentation des violences contre les pompiers a conduit le Sénat à installer une mission d’information au printemps. Auditionné le 15 mai, le président de la Fédération nationale des sapeurs-pompiers de France (FNSPF), le colonel Grégory Allione, a dénoncé un « phénomène de société ». « Les violences deviennent extrêmes », a-t-il alerté, relativisant l’efficacité de ces caméras dans leur champ actuel. La caméra « diminue les tensions » et agit comme « un calmant », « pour autant, on apprécierait de pouvoir la porter dans un champ missionnel qui est tout autre, qui est souvent au domicile », a-t-il demandé. « Loin de se limiter aux seules violences urbaines et aux quartiers dits sensibles, les agressions de sapeurs-pompiers sont de plus en plus commises dans le cadre de missions d’assistance aux personnes en détresse sociale (personnes fortement alcoolisées, sous l’emprise de stupéfiants…) ou psychologique, à domicile ou sur la voie publique », souligne la fédération, dans sa contribution à la mission sénatoriale.
Le 15 juin, le ministre de l’Intérieur avait annoncé « un plan ambitieux de lutte contre les agressions visant les sapeurs-pompiers en opération ». Le décret s’inscrit ainsi dans un « plan plus vaste contre les agressions visant les sapeurs-pompiers qui inclut notamment plus de simplicité lors des dépôts de plaintes et une importante campagne de communication à la rentrée », précise le ministère dans son communiqué.
Référence : décret n° 2019-743 du 17 juillet 2019 relatif aux conditions de l’expérimentation de l’usage de caméras individuelles par les sapeurs-pompiers dans le cadre de leurs interventions, JO du 19 juillet 2019. |