« Nous disons oui au principe des contrats, mais nous ne les signerons pas temps que les négociations sur les allocations individuelles de solidarité n’auront pas avancé », prévient Dominique Bussereau, le président de l’Assemblée des départements de France (ADF). En référence aux contrats que le gouvernement entend faire signer entre les préfets et 319 collectivités, dont l’ensemble des départements – un dessein précisé vendredi lorsque les ministres de l’Intérieur et des Comptes publics ont réuni les associations d’élus locaux.
Rappelant ce 26 septembre lors d’un point presse – à quelques heures de la présentation du projet de loi de finances au comité des finances locales et à trois semaines du congrès de l’ADF – que les négociations entamées avec l’ancien Premier ministre Manuel Valls sur le RSA avaient « failli aboutir », Dominique Bussereau assure que les présidents de départements sont bien « prêts à négocier » avec le nouvel exécutif. Un groupe de travail d’une quarantaine de membres s’est d’ailleurs constitué au sein de l’ADF et formulera des propositions lors du congrès. Le chef de l’Etat aurait fait savoir que ces négociations devront être terminées en avril prochain. Et sur le fond, Emmanuel Macron, y compris pendant la campagne présidentielle, s’est toujours dit plutôt favorable à une recentralisation du financement et du versement du RSA. En juillet lors de la Conférence nationale des territoires, il avait toutefois évoqué deux pistes possibles : soit la recentralisation et la reprise en main par l’Etat (option qui a sa préférence, donc), soit l’amélioration de la compensation assortie du renforcement de la péréquation entre les départements. Et avait prévu que la réforme prendrait place dans le projet de loi de finances pour 2019. Quant au point de vue des départements eux-mêmes… il n’est visiblement toujours pas tranché, entre les tenants d’une recentralisation et ceux qui prônent un simple mécanisme de compensation intégrale par l’Etat du reste à charge. L’ampleur de ce reste à charge ? « L’Etat paye aujourd’hui 57% de ce qu’il nous doit », indique le président de l’ADF. Et les dépenses liées au RSA s’élevaient à 10,1 milliards en 2016. Avec, certes, une tendance à la « stabilisation » depuis deux ans.
Cela reste « le dossier le plus lourd », considère Dominique Bussereau. D’autant plus lourd que d’après les éléments dont il disposait ce mardi matin, le fonds d’urgence débloqué ces dernières années en faveur des départements les plus en difficulté, qui s’élevait à 200 millions d’euros (50 millions l’an passé), ne figure pas dans le projet de loi de finances. Plus de fonds d’urgence… alors qu’Emmanuel Macron s’y serait engagé ? Toujours lors de la Conférence nationale des territoires, celui-ci avait en tout cas assuré le gouvernement « prendra en compte les situations d’urgence ».
MNA : on « est en train de foutre en l’air notre réseau de l’ASE«
Sur le front social, l’ADF continue par ailleurs d’attirer l’attention sur le problème des mineurs non accompagnés, les MNA. « Plus de 19.000 jeunes sont arrivés en 2016 et l’on peut estimer qu’ils seront 25.000 en 2017 », résume Dominique Bussereau, citant des départements tels que le Cher ou les Hautes-Alpes qui ont vu arriver sur leur territoire des centaines de nouveaux arrivants (570 dans les Hautes-Alpes) que les services départementaux de l’Aide sociale à l’enfance doivent prendre en charge. « Aujourd’hui, on met ces jeunes, qui arrivent généralement par des réseaux, avec les jeunes de l’ASE dans nos foyers pour l’enfance, parfois dans des hôtels, des auberges de jeunesse… », témoigne-t-il aussi. Il évoque à la fois l’importance de « bien traiter » ces mineurs (qui ne le sont pas toujours) et le fait qu’on « est en train de foutre en l’air notre réseau de l’ASE ».
Les départements avaient obtenu des avancées financières avec Bernard Cazeneuve (au-delà des cinq jours remboursés par l’Etat, prise en charge de 30% du coût et prise en charge de l’évaluation de la minorité). Les discussions continuent avec le nouveau gouvernement. Le comité de suivi sur les mineurs non accompagnés s’est ainsi réuni le 15 septembre avec les ministres en charge de la Justice et des Solidarités. Mais l’état actuel des négociations ne serait pas « suffisant » pour l’ADF. Pour l’association d’élus en effet, l’objectif est bien d' »aller vers une prise en charge totale par l’Etat, s’agissant d’une politique régalienne ». Là encore, Emmanuel Macron aurait assuré considérer lui aussi que l’accueil de ceux que l’on appelait auparavant les mineurs étrangers isolés était selon lui bien « du ressort de l’Etat ». Une conviction qui attend sa traduction.