Faire réussir la France de tous les territoires

Intervention de M. Pierre-René LEMAS, Directeur général de la Caisse des dépôts et Consignations

« Nous avons besoin d’une impulsion forte pour aider les collectivités ». Partageant le constat de la situation particulière des finances départementales, Pierre-René LEMAS a souhaité mettre l’accent sur l’impératif d’imaginer des solutions pour faire face aux tensions pesant actuellement sur les finances locales, afin de sauvegarder l’investissement. Quelques mois après sa prise de fonction comme Directeur général il a souhaité insister sur le rôle que peut jouer la Caisse des dépôts et Consignations pour faciliter les projets locaux et a rappelé les objectifs actuels de la structure : soutenir les investissements sur les territoires par des solutions nouvelles de financement, mais aussi redevenir un interlocuteur direct en retrouvant un réel ancrage territorial.
La réorganisation en cours du réseau territorial de la Caisse des dépôts et Consignations doit ainsi permettre de renforcer et fluidifier les relations avec les collectivités, y compris dans le cadre de financement de projets par la Banque européenne d’investissement (BEI), en tant que « porte d’entrée » vers celle-ci sur les territoires. La Caisse des dépôts et Consignations veut ainsi redevenir « un acteur majeur du financement des collectivités locales ». L’enveloppe de 20mds d’euros sur les fonds d’épargne de la Caisse pour le financement des projets locaux, doit servir cet objectif avec un enjeu, assouplir au maximum les conditions d’accès, de même que les project bonds qui permettent de financer les projets de plusieurs collectivités en associant la BEI. Pierre-René LEMAS a d’ailleurs insisté sur un enjeu stratégique pour les collectivités locales françaises,  celui de parvenir à « capter » les financements européens, suite à l’annonce de la commission européenne d’une mise en œuvre d’un grand plan d’investissement de 300mds d’euros pour les années à venir.

 

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Intervention de M. Michel Klopfer, consultant en finances locales, expert auprès de la Cour des comptes

La réforme territoriale en cours ne saurait s’analyser sans tenir compte du contexte général des finances locales, en particulier en ce qui concerne les départements. Pour mettre en perspective le débat sur le rôle de chaque échelon, Michel Klopfer a ainsi présenté une étude réalisée pour le compte de l’ADF sur l’impact des différents textes en cours d’examen sur les finances locales et départementales. Le constat tient en quelques points : les départements, dont la situation financière est déjà particulièrement dégradée par rapport aux autres échelons de collectivités, pourraient faire face très rapidement à une situation inédite dans l’histoire de la décentralisation avec l’impact cumulé des mesures prévues au PLF2015 de redressement des comptes publics et des mesures de compensation financière des transferts de compétences, telles que prévu par le PJL NOTR. Ainsi, selon les critères d’analyse retenus, au terme de ces deux réformes, 15 départements seulement se trouveraient encore dans une zone dite «  de sécurité » soit avec un taux d’épargne supérieur à 10 ans et une capacité de désendettement inférieure à 10 ans. Ceci s’explique par l’impact de la ponction de 3,9mds prévue sur les départements, mais aussi, toutes choses égales par ailleurs, par des modalités de compensation des transferts de compétences inadaptées, mettant à contribution la section de fonctionnement sans prévoir de dispositions particulières concernant la charge de la dette, pour une dotation de compensation globale des transferts évaluée autour de 6mds d’euros. L’étude démontre aussi l’effet à la hausse du PJL NOTR sur la dépense publique en général, au moins à court terme. L’analyse croisée des effets d’économie d’échelle liés à la régionalisation et des effets de mise à niveau du service public est nette : si 7 ans après, en fonction des hypothèses, l’impact anticipé va d’une économie de 700M d’€ à un surcoût de 600M €, 3 ans après le transfert, seul un effet à la hausse joue, pouvant se situer entre +1,5mds et + 800M euros.

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La vraie bataille à mener, c’est la décentralisation

La table ronde qui a clôturé le congrès de l’ADF a été l’occasion d’échanges francs et directs. Gérard-François Dumont, professeur à la Sorbonne, a donné le ton en affirmant que la France avait besoin d’une vraie décentralisation. « Nous sommes dans un monde globalisé et il faut certes penser « global », mais la réalité, elle, est locale ». Selon lui, pour préparer l’avenir, les territoires ne doivent pas perdre le lien à leur histoire et affirmer leur identité. Quant à la « métropolisation » qui consiste à développer des métropoles toujours plus grandes au détriment des zones rurales, elle ne va pas dans le bon sens, estime-t-il.
Alain Rousset est sur la même ligne quand il dit que « la vraie bataille à mener, aujourd’hui encore, c’est la décentralisation ». Le président de l’Association des régions de France (ARF) implore ainsi l’Etat de « lâcher la bride » aux collectivités locales. La taille des régions n’est pas un problème, analyse Alain Rousset. « Ce qui compte, ce sont leurs compétences économiques et les ressources qui vont avec. » Pour lui, il faut également faire confiance aux élus de terrain qui ne doivent pas être considérés comme des sous-traitants : « Ils savent faire mieux que Bercy pour accompagner des entreprises et créer des emplois », affirme-t-il. Et de citer l’Allemagne et le land de Hesse, région partenaire de l’Aquitaine, où les chefs d’entreprises, comme les demandeurs d’emploi, sont aidés plus efficacement.
« Notre République est en train de se lézarder », déplore pour sa part Vanik Berberian, président de l’Association des maires ruraux de France (AMRF). «?Nous vivons un grave malaise. Avant de parler de la taille, parlons des contenus ! », dit-il, rejoignant ainsi la position d’Alain Rousset. « L’Etat fait de la décentralisation centralisée », analyse Gérard-François Dumont. Alain Rousset ne dit pas autre chose quand il évoque « Paris et le désert français » et un « modèle centralisé qui ne marche plus ».
Enfin cette table ronde sans langue de bois a été le théâtre de déclarations importantes sur la réforme territoriale. Questionné par André Viola sur la pertinence et l’efficience de transférer certaines compétences des départements aux régions, Alain Rousset a concédé ne pas être favorable, à titre personnel, au transfert des routes et des collèges.
Pour conclure, Gérard-François Dumont a rappelé que chaque territoire, grand ou petit, a cependant sa chance citant en exemple celui d’Espelette. « Le village n’avait que dix producteurs de piment. Il en compte aujourd’hui 150 et il est connu dans le monde entier. »

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Regard sur la réforme territoriale, par M. Gérard Larcher

Gérard Larcher, président du Sénat, empêché en dernière minute, a néanmoins souhaité souligner le rôle essentiel des départements en matière de cohésion sociale et de développement. Il a rappelé la volonté de la haute assemblée de dialoguer.
Gérard Larcher : « Ce congrès de l’Assemblée des départements de France se déroule à un moment particulier. Jamais, en effet, dans son histoire, le niveau départemental n’a été autant questionné. Pourtant, son rôle et son utilité pour nos territoires, nos concitoyens et nos entreprises ne cesse d’être démontré, jour après jour.
En votant, à l’unanimité des suffrages exprimés, il y a deux semaines de cela, un article premier au projet de loi présenté par le gouvernement, indiquant que « les départements sont garants du développement territorial, de la solidarité et de la cohésion sociale sur leur territoire », le Sénat a montré combien la collectivité départementale constituait une pièce essentielle de notre organisation territoriale.
Celle-ci peut évoluer, naturellement. Mais si l’on veut faire évoluer efficacement notre organisation territoriale, il faut commencer par écouter la voix des territoires.
D’ailleurs, les initiatives ou expérimentations conduites par les départements, eux-mêmes, illustrent combien l’innovation territoriale peut être fertile.
Le débat sur les collectivités ne doit pas, non plus, rester un débat d’experts. Pour que chacun de nos concitoyens perçoive l’utilité de l’action publique locale, il faut clarifier l’exercice de certaines missions et établir des règles claires dans les relations entre l’État et les différents niveaux de collectivités. Cela pourra être une des plus-values de la discussion parlementaire qui va s’ouvrir, en fin d’année, autour de la réforme territoriale et de la répartition des compétences entre les différentes catégories de collectivités territoriales.
Enfin, ce moment est également un moment particulier pour le Sénat, puisque ce dernier a été renouvelé le 28 septembre dernier. Le Sénat assure, selon les termes de l’article 24 de la Constitution, « la représentation des collectivités territoriales de la République ».
Il représente tous les territoires et a vocation à dialoguer avec les associations représentatives des collectivités.
Je souhaite, pour cela, nouer une relation de travail durable et un partenariat de long terme entre l’Assemblée des départements de France et la haute assemblée. Je resterai, avec les Sénateurs, à l’écoute de chacun d’entre vous. »

 

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